Cadre juridique de Roblox : est-il abouti ?
43 millions d’utilisateurs actifs quotidiens. 9,5 millions de développeurs. Plus de 450 millions de dollars de chiffre d’affaires trimestriel. Difficile de passer à côté du jeu Roblox, deuxième jeu vidéo avec le plus grand nombre d’utilisateurs après Minecraft. Pourtant, les personnes âgées de plus de 16 ans en ont rarement entendu parler. Legal Brain Avocats vous décrit l’état actuel du cadre juridique de Roblox.
Roblox, un jeu vidéo destiné avant tout aux enfants
Destiné avant tout aux enfants, Roblox est un jeu de type sandbox (“bac à sable” en anglais) lancé en 2006 par David Baszucki. Très populaire auprès des jeunes adolescents depuis plusieurs années (la plateforme compte 67% d’utilisateurs âgés de moins de 16 ans), le but du jeu est de construire un jeu afin qu’il soit visité par les autres joueurs.
Il est également possible de changer l’apparence de son personnage en achetant des vêtements, couvre-chefs ou même des visages grâce à une monnaie virtuelle appelée le Robux. La conception d’un jeu par les développeurs (aussi appelés créateurs) et la vente d’articles pour personnaliser les avatars sont rémunérés. Depuis le début de l’épidémie, le jeu Roblox a donc su faire fleurir un marché économique important au point que plusieurs entreprises sont déjà intéressées par cet univers virtuel.
Roblox, un modèle économique innovant
Le système imaginé par Roblox est basé sur une logique simple : capter de jeunes joueurs ayant tendance à plus facilement dépenser de l’argent sur le jeu afin de donner envie aux développeurs adultes de créer plus de jeux (sur le jeu). Pour faire simple, les plus jeunes financent les créations des plus âgés qui sont déterminés à les vendre. Roblox est donc bien plus qu’un simple jeu vidéo à la Minecraft (pourtant tous deux très similaires dans leur apparence cubique), c’est une véritable plateforme proposant des millions de jeux. Rien d’étonnant donc que la capitalisation boursière de l’entreprise Roblox Corporation soit égale à 43,02 milliards de dollars.
Afin d’alimenter ce système prolifique, Roblox compte sur la mise en avant des créateurs les plus populaires du jeu. Cette stratégie permet de faire émerger de véritables blockbusters du jeu vidéo qui retiendront l’attention du plus grand nombre (et des plus jeunes). C’est le cas par exemple du studio Uplift Games ayant créé le jeu Roblox “Adopt Me” qui a compté à lui seul plus de 25 milliards de visites au total. Il s’agit d’un mini monde virtuel dans le jeu où les joueurs ont la possibilité de s’occuper d’animaux de compagnie, de construire leur propre maison et d’améliorer l’apparence de leur avatar.
Ce jeu est, certes le plus populaire de Roblox, mais aussi le plus lucratif. En effet, l’évolution dans ce monde virtuel incite grandement à l’achat de Robux permettant d’acquérir un certain nombre d’outils et d’articles personnalisés. Avec 5,9 milliards de visite en moyenne par an, le jeu aurait déjà rapporté plus de 20 millions de dollars à ses deux créateurs. Quant à Roblox Corporation, le jeu de Uplift Games lui a rapporté quatre fois cette somme grâce à la vente de Robux aux joueurs.
L’univers enfantin du jeu Roblox a su séduire de nombreux enfants à travers le monde, poussant parfois certains à dépenser d’importantes sommes dans cet univers virtuel. Les entreprises l’ont bien compris et certaines d’entre elles s’y installent déjà.
Roblox, un espace d’expérimentations pour les entreprises
Alors que Mark Zuckerberg annonçait en octobre 2021 le changement de nom de Facebook en “Meta” afin de se consacrer entièrement à la création d’un métavers, Roblox compte suivre la même direction. En effet, l’objectif de Mark Zuckerberg est de proposer des rencontres entre amis dans un univers virtuel. Les utilisateurs pourraient alors jouer ensemble à des jeux, faire du shopping ou même aller voir un concert grâce à la réalité virtuelle.
Mais l’autre objectif est de créer un réseau social beaucoup plus immersif dans lequel les utilisateurs pourraient acheter des articles auprès d’entreprises déjà connues (ou non) pour personnaliser leur avatar, leur maison ou autres. Ce second objectif a pour effet d’attirer un certain nombre d’entreprises.
Nike fait partie de ces entreprises. Lancé en novembre 2021, NikeLand est un monde virtuel à l’effigie de la marque où chacun peut participer à des mini-jeux ou acheter des articles Nike. Le monde créé par la marque de sport est inspiré directement de son siège social avec, autour de celui-ci, de multiples terrains de sports (football, basket etc.).
NikeLand est donc un bon moyen pour Nike de toucher de nouveaux clients dans un monde virtuel pour mieux les retrouver dans le monde réel. Nike pourrait également utiliser NikeLand pour tester de nouveaux produits et évaluer les intérêts des consommateurs, mais aussi de permettre aux enfants de co-créer des articles. On peut imaginer qu’une collection conçue en ligne soit finalement vendue dans le monde physique.
Nike n’est pas le seul à avoir eu l’idée de créer son propre univers virtuel dans Roblox. Dans un jeu où la personnalisation des avatars est importante, il était évident que l’industrie du textile s’y implante. En 2021, Vans, Gucci ou encore Ralph Lauren ont eu l’idée de proposer aux utilisateurs d’habiller leurs avatars à l’image de leur marque.
2022 promet donc d’être sous le thème des métavers. Mais alors, le droit ne devrait-il pas réfléchir dès maintenant à une régulation de ces plateformes ?
Le cadre juridique de Roblox face au développement des métavers
C’est inévitable, le droit est déjà bouleversé par l’arrivée des métavers. En prenant l’exemple de Roblox, on voit que de nombreuses branches du droit sont impactées par cet univers virtuel notamment le droit de la consommation (avec l’achat d’articles personnalisés au sein du métavers), le droit pénal (infractions virtuelles et les modes de preuves), le droit civil ( avec la réparation de préjudice commis dans cet univers), le droit du travail (les développeurs/joueurs sont-ils des salariés et comment vont-ils contribuer aux contributions sociales du monde réel ?) ou plus généralement le droit des affaires (avec par exemple le droit des marques créées).
Au regard de la transformation d’un simple jeu vidéo enfantin en véritable métavers, la proportion importante de mineurs au sein de Roblox pose aussi des questions nouvelles (25% des utilisateurs ont moins de 9 ans !). Dans “un jeu” où l’argent est au centre de nombreuses activités, il peut-être nécessaire de réguler l’accès à ce monde virtuel en proposant un âge minimum (comme le prévoit déjà le RGPD pour les réseaux sociaux). Il est même possible depuis quelques mois d’enchérir sur des œuvres d’art directement dans Roblox ! Pas sûr que ce genre d’activités soient appropriées pour des enfants. A voir à l’avenir comment les législations nationales et supra-nationales sauront s’adapter au développement des métavers.
Le droit ne reste pas inactif face à ces évolutions. L’Europe a en effet proposé récemment deux règlements européens visant à réguler ce type de plateforme : le Digital Market Act (DMA) et le Digital Service Act (DSA). Ces textes pourraient très bien s’appliquer à Roblox. Aujourd’hui, le DSA vise toutes les plateformes numériques alors que le DMA vise uniquement les “géants du web” appelés “gatekeepers” dans le texte. Ces gatekeepers sont caractérisés par leur taille, leur nombre important d’utilisateurs réguliers, leur chiffre d’affaires et leur place importante dans le marché. Autant dire que Roblox est plus que concerné par ce futur règlement.
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